February 14, 2023
L’honorable Judith G. Seidman : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à titre de porte-parole de l’opposition au sujet du projet de loi C-22, Loi visant à réduire la pauvreté et à renforcer la sécurité financière des personnes handicapées par l’établissement de la prestation canadienne pour les personnes handicapées et apportant une modification corrélative à la Loi de l’impôt sur le revenu.
Je félicite et remercie mon collègue le sénateur Cotter, qui est parrain de ce projet de loi, pour son important travail. J’ai hâte de continuer à collaborer avec lui afin de veiller à l’efficacité et à l’efficience du processus.
La communauté des personnes handicapées s’entend généralement au sujet de l’importance de cette mesure législative, et je comprends parfaitement pourquoi nous devons procéder dans l’urgence.
Au Canada, les antécédents en matière de soutien aux personnes handicapées sont relativement peu nombreux, en particulier à l’échelon fédéral. Dans un article intitulé Disability in Canada: An Historical Perspective, Aldred Neufeldt, professeur émérite au programme d’études en réadaptation communautaire et sur la condition des personnes handicapées à l’Université de Calgary, note que pendant les premières décennies des années 1900, le Québec, puis l’Ontario, ont adopté des lois d’indemnisation des accidents du travail, mais que c’est la guerre qui a incité le gouvernement à créer des services de réadaptation. Après la Deuxième Guerre mondiale, les vétérans revenant au pays ont insisté sur le fait qu’ils avaient le droit d’être traités comme des citoyens pouvant encore contribuer à la société. C’est ainsi que les indemnisations des travailleurs et les allocations aux anciens combattants ont fait partie des premières formes d’indemnisation destinées aux Canadiens ayant certains types de handicaps.
Dans son livre, Struggling for Social Citizenship: Disabled Canadians, Income Security, and Prime Ministerial Eras, Michael Prince, professeur titulaire de la chaire Lansdowne en politique sociale à l’Université de Victoria, observe que, bien que l’indemnisation des travailleurs et les allocations aux anciens combattants aient été établies dans le cadre de programmes distincts, la plupart des programmes ultérieurs pour les personnes handicapées, y compris les prestations initiales pour les aveugles, les prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, l’aide sociale et l’assurance-emploi, font partie de cadres stratégiques plus larges. Comme l’affirme M. Prince : « Ces divers points d’accès et ces différents modèles de programmes donnent lieu à une citoyenneté sociale irrégulière pour les personnes handicapées. »
En effet, dans son étude de 2018 sur le crédit d’impôt pour personnes handicapées et le régime enregistré d’épargne-invalidité, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a entendu de nombreux témoins parler de la complexité entourant les demandes de participation aux programmes de soutien pour personnes handicapées. Les témoins nous ont exhortés à simplifier et à clarifier les processus relatifs aux mesures de soutien fédérales. Dans notre rapport, nous avons recommandé :
Que le ministre des Finances et le ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social travaillent en étroite collaboration avec les autres ordres de gouvernement afin d’harmoniser les processus de demandes relatifs à des programmes de soutien pour personnes handicapées.
Notre rapport recommandait également que les deux ministres établissent « un revenu de base ou un revenu garanti pour les personnes ayant de graves incapacités ».
Un rapport antérieur, intitulé Pauvreté, logement, itinérance : les trois fronts de la lutte contre l’exclusion, a été publié en 2009, toujours par le Comité des affaires sociales et son Sous-comité sur les villes. Le rapport décrit comment la source et le niveau de revenu d’une personne handicapée dépendent de la date et de la cause de l’incapacité et des prestations d’assurances, publiques ou privées, qu’a pu recevoir la personne lorsqu’elle est devenue handicapée.
Le rapport donne l’avertissement suivant :
Compte tenu de la complexité des programmes actuels et leur interaction, trop de personnes […] peuvent se faire renvoyer d’un « système » à l’autre pour finir par ne pas disposer d’un revenu adéquat, voire n’en avoir aucun.
Ce manque de continuité dans l’admissibilité aux mesures de soutien du revenu pour les personnes handicapées ne fait qu’ajouter encore plus d’incertitude dans la vie des Canadiens.
Le rapport de 2009 recommande également l’élaboration et la mise en œuvre d’un revenu de base pour les personnes ayant une incapacité grave, bien que le revenu de base envisagé par le Sous‑comité sur les villes visait à remplacer le revenu tiré de l’aide sociale provinciale, ce qui aurait permis aux provinces de réaliser des économies substantielles. Lors de son témoignage devant le comité, M. Prince a souligné que ce modèle aurait permis à un demi-million de Canadiens de ne plus dépendre de l’aide sociale provinciale et que les provinces auraient ensuite pu réaffecter des fonds aux services d’aide aux personnes, à l’éducation, aux écoles inclusives, aux parcs et aux services de loisirs qui favorisent l’intégration de tous, aux services d’aide aux familles et au transport en commun.
Ce n’est pas ce que propose le projet de loi C-22. Comme l’a souligné la ministre Qualtrough dans son discours en deuxième lecture à l’autre endroit, cette nouvelle prestation sera un supplément de revenu, et non un revenu de remplacement. Cette prestation ne vise pas non plus à remplacer les mesures d’aide qui existent déjà dans les provinces et les territoires. Lorsqu’elle sera disponible, la prestation canadienne pour les personnes handicapées devrait fournir un revenu mensuel supplémentaire aux personnes handicapées. Il convient toutefois de noter que ce type de programme ne réduira pas les exigences financières des provinces. Une approche différente aurait pu permettre d’investir davantage dans les services destinés aux personnes handicapées.
Le Canada s’est toujours distingué des États-Unis et de la plupart des pays européens pour ce qui est des mesures de soutien pour les personnes handicapées. En effet, au sein de la fédération canadienne, les provinces assument la principale responsabilité des services de santé, de l’éducation et des services sociaux. Selon l’OCDE, le Canada est à la traîne au chapitre des dépenses publiques destinées aux cas d’incapacité, c’est-à-dire d’invalidité, de maladie et d’accident du travail.
Parmi les pays du G7, le Canada se classe au septième rang pour ce qui est des dépenses publiques en matière d’incapacité, en pourcentage du produit intérieur brut total. En effet, le Canada n’y consacre que trois quarts de 1 % de son PIB. Les États-Unis y consacrent 1 % de leur PIB, et le Japon environ autant. Nos homologues européens y consacrent une part beaucoup plus importante de leur PIB : la France, 1,7 %; l’Italie, 1,8 %; le Royaume-Uni, 1,9 %; et l’Allemagne, 2,25 %.
Nous avons l’obligation morale d’en faire plus. Le préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations unies affirme que :
[…] l’avènement d’un monde où les êtres humains seront libres de parler et de croire, libérés de la terreur et de la misère, a été proclamé comme la plus haute aspiration de l’homme.
Depuis trop longtemps, les personnes handicapées du Canada ne peuvent pas vivre libérées de la misère, une situation aux effets dévastateurs.
Selon l’Enquête canadienne sur l’incapacité de 2017, qui contient les données les plus récentes dont nous disposons, un Canadien sur cinq âgé de 15 ans et plus présentait au moins une incapacité. La probabilité d’avoir une incapacité augmente avec l’âge : 13 % des personnes de 15 à 24 ans avaient une incapacité, alors que ce pourcentage était de 47 % chez les personnes de 75 ans et plus. Il existe également une forte corrélation entre incapacité et pauvreté, comme l’ont souligné toutes les personnes qui ont pris la parole. Ainsi, parmi les Canadiens de 25 à 64 ans, 28 % de ceux qui ont une incapacité sévère vivent dans la pauvreté, alors que ce pourcentage est de 10 % parmi les personnes sans incapacité.
La professeure Deborah Stienstra, titulaire de la Chaire Jarislowsky sur les familles et le travail à l’Université de Guelph, souligne que les personnes handicapées se butent à des obstacles en matière d’éducation et d’emploi, à des coûts élevés notamment pour obtenir les mesures de soutien dont elles ont besoin, et à des obstacles concernant les systèmes de transport, de télécommunication et de santé. Voici ce qu’elle dit :
En plus de favoriser la stigmatisation liée aux handicaps, chacun de ces groupes d’obstacles restreint la possibilité, pour les personnes handicapées, de participer pleinement à la vie citoyenne et peut mener à une vie marquée par la pauvreté et l’exclusion.
Le projet de loi C-22 nous arrive avec des amendements du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées — le comité HUMA — de l’autre endroit. Il n’offre pas beaucoup de détails — il s’agit de ce qu’on appelle souvent un projet de loi-cadre. Il établit des dispositions générales pour l’administration de la prestation et autorise le gouverneur en conseil à mettre en œuvre la plupart des éléments de conception de la prestation par voie de règlement. Comme l’ont souligné des députés à l’étape de la deuxième lecture, le projet de loi C-22, dans sa version d’origine, était davantage une promesse d’agir qu’une vraie proposition. Grâce aux neuf amendements apportés par le comité HUMA, le projet de loi est amélioré dans une certaine mesure.
Le premier amendement ajoute la définition de « handicap » au projet de loi, la même que celle qui se trouve dans la Loi canadienne sur l’accessibilité.
Le deuxième amendement exige du gouvernement fédéral qu’il rende public tout accord fédéral et provincial-territorial conclu au sujet de la prestation canadienne pour les personnes handicapées.
Le troisième amendement exige que la prestation soit indexée au taux d’inflation.
Le quatrième amendement exige que le processus de demande soit exempt d’obstacles.
Le cinquième amendement exige que, au moment d’établir le montant de la prestation, le gouverneur en conseil tienne compte du seuil officiel de la pauvreté.
Le sixième amendement exige du ministre qu’il dépose à la Chambre des communes, dans les six mois suivant la date d’entrée en vigueur de la loi, un rapport sur le dialogue et la collaboration auprès de la communauté des personnes handicapées et qu’il dépose, dans l’année suivant la date d’entrée en vigueur de la loi, un rapport concernant l’état d’avancement du processus réglementaire.
Le septième amendement précise que le ministre est tenu d’offrir à des personnes handicapées des possibilités de collaborer à l’élaboration et à la conception des règlements.
Le huitième amendement resserre l’échéancier relatif aux examens parlementaires de la loi, faisant passer les échéances de trois ans et cinq ans après l’entrée en vigueur à un an et trois ans après l’entrée en vigueur puis tous les cinq ans par la suite. Enfin, le neuvième amendement fixe la date d’entrée en vigueur au plus tard un an après la sanction royale.
Le Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes a fait de l’excellent travail. Lorsque le comité sénatorial étudiera le projet de loi, il sera de notre responsabilité d’examiner ce travail et d’entendre le témoignage d’experts et de parties intéressées pour nous assurer qu’aucun problème n’a été créé par inadvertance et que le projet de loi n’omet rien d’important.
C’est peut-être l’occasion tout indiquée de rappeler à mes honorables collègues que nous nous sommes retrouvés dans une situation comparable il y a à peine trois ans et demi concernant un autre projet de loi d’importance vitale pour la communauté des personnes handicapées : le projet de loi C-81, Loi canadienne sur l’accessibilité. Tout le monde appuyait ce projet de loi à l’unanimité et on nous pressait, un peu comme aujourd’hui, d’adopter le projet de loi sans amendement.
Bien que pratiquement tous les témoins entendus au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie nous aient demandé d’adopter le projet de loi de toute urgence, quelques membres de la communauté des personnes handicapées avaient exprimé des préoccupations à l’égard de certaines omissions. Le comité a estimé que nous pourrions nous concentrer sur quelques amendements clairs qui rehausseraient la valeur du projet de loi C-81 sans en compromettre l’adoption. Bien que l’appui manifesté à l’égard de ce projet de loi était fort, le désir de l’améliorer était encore plus fort. Le Sénat — vous tous, sénateurs — s’est mis d’accord, nous avons adopté le projet de loi modifié à l’étape de la troisième lecture, et la Chambre a accepté tous nos amendements. Il est important de se rappeler de l’essentiel de ces amendements, car cela met en lumière la valeur d’un véritable second examen objectif.
Premièrement, les échéances. Le projet de loi C-81 ne prévoyait aucun échéancier précis pour que le Canada devienne un pays entièrement accessible. Sans échéancier, il n’y a pas de reddition de comptes, les progrès ne peuvent pas être mesurés et les normes risquent de ne jamais être élaborées et promulguées par la loi. Nous avons donc recommandé de fixer l’année 2040 comme date limite pour la mise en œuvre complète des exigences en matière d’accessibilité. Dans le même ordre d’idées, nous avons ajouté un amendement visant à garantir que les mesures d’accessibilité ne soient pas retardées ou reportées en raison de circonstances imprévues, mais qu’elles soient adoptées dès que possible.
Deuxièmement, l’amendement suivant concernait la reconnaissance de langues des signes particulières qui seraient désignées dans le projet de loi comme étant les langues des personnes sourdes. Cela permettait de s’assurer que les personnes sourdes ne seraient pas oubliées et qu’elles auraient un accès équitable à l’information, à la communication, à l’emploi, aux services gouvernementaux, aux transports et aux autres secteurs sous réglementation fédérale. Honorables sénateurs, ces ajouts à un bon projet de loi ne sont pas négligeables.
Pour en revenir à la situation actuelle et au projet de loi C-22, il y a plusieurs questions qu’il sera utile d’examiner en comité. Tout d’abord, le neuvième amendement au projet de loi, qui modifie la date d’entrée en vigueur, mérite une réflexion approfondie. L’organisme Accessibility for Ontarians with Disabilities Act Alliance a publié sur son site Web une réponse aux amendements dans laquelle il fait valoir ce qui suit :
Tel que modifié par le comité HUMA, l’article 14 ne précise pas de date d’entrée en vigueur du projet de loi. L’article 5(2) de la Loi d’interprétation fédérale comble ce vide en faisant entrer le projet de loi en vigueur dès la sanction royale.
Je ne suis pas une spécialiste du domaine législatif, mais j’ai consulté une personne qui l’est, et elle est d’avis que cet amendement pourrait être problématique. Nous devrions accorder l’attention voulue à cet article et le modifier si c’est dans l’intérêt des Canadiens.
Deuxièmement, le comité devrait examiner les programmes de soutien aux personnes handicapées qui sont actuellement offerts au Canada et la façon dont ils pourraient interagir avec cette nouvelle prestation. Jennifer Robson, professeure agrégée et directrice du programme de gestion politique de l’Université Carleton, a dit au Hill Times en septembre 2022 que les programmes de soutien provinciaux et fédéraux ont chacun des définitions différentes du terme « handicap », diverses catégories de prestations et des règles distinctes concernant les autres sources de revenus. Elle a décrit les programmes actuels comme des passoires dans les trous desquelles on tentait d’introduire la nouvelle prestation.
Nous devons nous assurer que le processus de demande des prestations provinciales et fédérales n’est pas excessivement bureaucratique pour empêcher les personnes handicapées d’être laissées pour compte. Il devrait y avoir un processus bien défini de surveillance et de dépôt de plaintes pour interjeter appel d’un refus, d’une réduction ou d’une récupération des prestations, peut-être auprès d’un tribunal ou d’un défenseur des droits des personnes handicapées. L’une des plaintes formulées au Comité sénatorial des affaires sociales sur le crédit d’impôt pour personnes handicapées est que l’Agence du revenu du Canada est chargée du processus d’examen et de traitement des plaintes, mais que son travail laisse à désirer et est extrêmement lent.
Troisièmement, le comité devrait prendre en considération l’avantage d’établir les montants de la prestation en fonction du revenu net du demandeur et non du revenu de son ménage. Louise Bourgeois, présidente du Mouvement personne d’abord de Sainte‑Thérèse, a dit ceci au comité de la Chambre :
Les personnes vivant avec une déficience intellectuelle sont parmi les plus pauvres de notre société. Elles sont aussi plus à risque de vivre de la violence économique. Il sera important que le montant donné aux personnes ne dépende pas du revenu de leur conjoint. Ce montant devra être calculé et remis à la personne individuellement. Après tout, le projet de loi vise à renforcer la sécurité financière des personnes.
Les données de Statistique Canada indiquent également que les personnes handicapées sont plus susceptibles d’être victimes de violence entre partenaires intimes que les personnes qui ne sont pas handicapées. Dans le cadre d’une analyse des données de 2018, Laura Savage, du Centre canadien de la statistique juridique et de la sécurité des collectivités, de Statistique Canada, note ce qui suit :
Le fait d’avoir une incapacité peut accroître la vulnérabilité de certaines femmes à la violence entre partenaires intimes. Par exemple, les femmes ayant une incapacité pourraient être plus susceptibles de souffrir d’isolement ou de dépendre davantage d’un partenaire intime que celles n’ayant aucune incapacité.
Ces liens de dépendance sont souvent de nature économique.
Lorsque le député du Parti vert Mike Morrice a présenté un amendement au comité de la Chambre pour cibler cette préoccupation, un représentant du ministère lui a souligné que la plupart des prestations fédérales sont fondées sur le revenu familial. La prestation canadienne pour les personnes handicapées permettrait-elle, en particulier, d’accroître la sécurité financière du bénéficiaire afin de favoriser l’autonomie financière? Un amendement pourrait contribuer à tenir compte de cette vulnérabilité.
Dans le même ordre d’idées, une autre question importante concerne le caractère suffisant de la prestation pour les personnes handicapées et la nécessité de définir clairement que la prestation elle-même doit être supérieure au seuil de pauvreté. Le montant de la prestation n’est pas précisé dans le projet de loi actuel, qui laisse au gouverneur en conseil et aux règlements le soin de le fixer. Ce défi a été abordé dans la question que la sénatrice Pate a posée au sénateur Cotter la semaine dernière. Cette question a toutefois été jugée irrecevable à l’autre endroit. Le comité sénatorial devrait se pencher sur le caractère suffisant de la prestation. On peut établir des comparaisons détaillées avec de nombreux pays. En effet, la plupart des pays européens ont une prestation pour les personnes handicapées. La Suisse, la Norvège et le Danemark offrent les prestations mensuelles les plus élevées, et la Norvège offre des prestations universelles, contrairement à de nombreux autres pays, qui n’offrent des prestations qu’aux personnes qui sont sur le marché du travail.
Bien que le comité de la Chambre des communes ait adopté de nombreux amendements utiles et qu’il ait vraiment étoffé cette loi‑cadre, ce projet de loi laisse néanmoins beaucoup de points à régler dans la réglementation. Le gouverneur en conseil, c’est-à-dire la gouverneure générale agissant sur l’avis du Cabinet, est chargé d’élaborer les règlements pour la substance même de la mesure : les critères d’admissibilité, le montant de la prestation, les périodes de paiement, le processus de demande, l’examen ou le réexamen des décisions, les appels, le versement rétroactif des prestations, les demandes faites au nom de personnes incapables de gérer leurs propres affaires, l’application de la loi lorsqu’un demandeur ou un bénéficiaire décède et la désignation des créances.
Chers collègues, nous devons tous réfléchir à la grande considération qui est accordée au Cabinet dans le projet de loi. Cette approche restreint le débat au Parlement et ouvre la porte à de futurs changements, non pas par voie législative, mais par des décrets du gouverneur en conseil. De plus, s’il est essentiel que le gouvernement ait l’intention de consulter pleinement la communauté des personnes handicapées pour ce qui est de la teneur et de la mise en œuvre de cette mesure législative, je demeure préoccupée par le peu de détails fournis dans le projet de loi au sujet du processus et des échéances.
Pour conclure, j’appuie les principes du projet de loi C-22, mais je déplore que le cadre présenté soit aussi dégarni. Le gouvernement aurait pu — et aurait dû — faire mieux. Maintenant, honorables sénateurs, accomplissons notre travail et renvoyons le projet de loi au comité. Merci.