May 27, 2021
Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de prendre la parole aujourd’hui en tant que marraine au Sénat du projet de loi C-220, Loi modifiant le Code canadien du travail (congé de décès).
Le projet de loi a été présenté à l’autre endroit par mon collègue, le député Matt Jeneroux. Le projet de loi s’appuie sur le travail que le député a commencé à l’Assemblée législative de l’Alberta et qu’il s’efforce maintenant d’étendre au niveau national.
L’objectif du projet de loi est très simple : il s’agit d’améliorer le soutien aux travailleurs au pays qui déplorent la perte d’un être cher.
La perte d’un être cher, qu’elle survienne soudainement ou qu’elle ait été attendue depuis un certain temps, peut être un choc terrible et une expérience extrêmement émotionnelle et peut s’accompagner de nombreuses obligations d’ordre familial et pratique.
Le projet de loi vise à prolonger la durée du congé de décès auquel un employé a droit en cas de décès d’un membre de sa famille.
Actuellement, en vertu du paragraphe 210(1) du Code canadien du travail, les employés ont droit à un maximum de cinq jours de congé de décès en cas de décès d’un membre de la famille immédiate. Le projet de loi dont nous sommes saisis propose de faire deux choses.
Premièrement, il prolongerait le congé de décès, qui passerait de cinq jours ouvrables à dix jours, trois de ces journées étant rémunérées. La modification s’appliquerait à tous les employés assujettis au Code canadien du travail, c’est-à-dire quelque 18 000 employeurs sous réglementation fédérale et jusqu’à 2 millions de travailleurs au Canada. Le congé doit être pris dans les six semaines qui suivent les funérailles, l’inhumation ou le service commémoratif du membre de la famille décédé.
Deuxièmement, le projet de loi rendrait admissibles à un congé de décès les employés qui ne travaillent pas parce qu’ils ont pris un congé de soignant non rémunéré pour prendre soin d’un membre de leur famille atteint d’une maladie grave. Le projet de loi permettrait à ces employés d’obtenir jusqu’à 10 jours de congé de décès lors du décès de la personne dont ils s’occupaient.
Signalons aussi que, dans le contexte du Code canadien du travail et aux fins du congé de soignant, la notion de « membre de la famille » ne se limite pas à la famille immédiate. La famille immédiate comprend les époux, les conjoints de fait, les parents, les beaux-parents, les grands-parents, les enfants, les petits-enfants, les frères et sœurs, et les membres de la famille élargie qui habitent de façon permanente avec l’employé.
La définition de « membre de la famille » comprend aussi les tantes et les oncles ainsi que les neveux et nièces. Est aussi considérée comme membre de la famille une personne qui est, pour l’employé, comme un parent proche ou une personne qui considère l’employé comme un parent proche.
Le code permet aux employés de prendre un congé sans solde pour prendre soin d’un de ces membres de la famille. Grâce à la nouvelle disposition du projet de loi C-220, ce groupe d’employés peut prendre un congé de décès assorti de la protection d’emploi lorsque le parent décède.
Le projet de loi C-220 jouit d’un vaste appui et tous les partis de l’autre endroit ont louangé ses objectifs empreints de compassion.
En fait, tous les partis ont travaillé de concert pour améliorer le projet de loi au moyen d’amendements contenant les dispositions que nous examinons aujourd’hui.
Honorables sénateurs, quand il a pris la parole à l’étape de la deuxième lecture de ce projet de loi, M. Jeneroux a raconté que sa grand-mère était tombée gravement malade lorsqu’il n’était encore qu’un jeune homme. Il souhaitait consacrer du temps à sa grand-mère, mais il se heurtait à la réalité selon laquelle à cette époque, il n’existait aucune protection d’emploi dans de telles circonstances en Alberta. Il a donc été astreint à aller travailler, à l’instar de tant d’autres Canadiens se trouvant dans des circonstances semblables.
J’oserais dire que tous les sénateurs ont probablement déjà fait face à la maladie d’un membre de leur famille ou à la perte d’un être cher. Nous reconnaissons tous que certains employeurs peuvent se montrer très généreux et bienveillants dans de telles circonstances, alors que d’autres adoptent l’attitude contraire. Comme nous le savons, les travailleurs qui s’occupent d’un membre de leur famille ou qui prennent congé à la mort d’un membre de leur famille s’infligent un important sacrifice si cette période n’est pas rémunérée. Ce projet de loi permet d’élargir leurs protections juridiques.
Lorsque ce projet de loi a été étudié par le Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes, il a reçu un vaste appui. Voici ce que M. Paul Adams, qui est membre de l’Alliance canadienne pour le deuil, a déclaré en février au Comité des ressources humaines de la Chambre des communes :
Presque chacun d’entre nous a souffert de la perte d’une mère ou d’un père, d’un conjoint ou d’un partenaire, d’un enfant ou peut-être d’un ami proche. Si nous avons le temps et la possibilité de faire notre deuil, et si nous avons la chance d’avoir le soutien de notre famille et de nos amis, après un certain temps, notre vie reprend son cours, même si la douleur de la perte ne disparaît jamais complètement.
Ce que la recherche nous dit, c’est que lorsque le deuil est compliqué, si les circonstances nous empêchent d’avoir le temps ou le soutien nécessaire pour faire notre deuil, cela peut engendrer une dépression ou de l’anxiété, une dépendance ou une addiction, un suicide ou des pensées suicidaires. Lorsqu’elle survient, cette situation peut créer des fardeaux en milieu de travail sur le plan de la productivité et des jours de travail perdus. Bien sûr, cela impose aux personnes endeuillées et à leurs proches un fardeau d’angoisse qui pourrait être évité […]
Ce projet de loi donnera, à un grand nombre de Canadiens, le droit à un congé plus généreux pour faire leur deuil, se remettre et réintégrer le monde du travail.
D’autres témoins ont aussi signalé au comité les avantages indirects que les soins non rémunérés procurent déjà au Canada.
Mme Kelly Masotti, vice-présidente de la défense des droits à la Société canadienne du cancer, a signalé que la valeur économique des soins non rémunérés au Canada dépasse 25 milliards de dollars par année. Elle a ajouté ceci :
L’assouplissement des congés pour les soignants donnera, à un plus grand nombre de Canadiens, le temps nécessaire pour guérir, minimiser les difficultés économiques et s’occuper de certaines choses plus pratiques, par exemple pour organiser les funérailles et contacter les banques et les fournisseurs de services après le décès d’un proche.
Le projet de loi C-220 a reçu l’appui unanime de tous les partis à l’étape de la troisième lecture. Lorsqu’il a pris la parole au sujet du projet de loi à l’étape de la troisième lecture, le député néo-démocrate Daniel Blaikie a déclaré que la présente pandémie nous a appris qu’il est important que nous créions tous l’espace nécessaire pour prendre soin les uns des autres. Je suis d’accord avec M. Blaikie.
La reconnaissance la plus importante de ce que la coopération a permis d’accomplir dans l’autre endroit est peut-être venue d’Anthony Housefather, secrétaire parlementaire de la ministre du Travail, lorsqu’il a personnellement remercié M. Jeneroux en ces termes :
[…] avec ce projet de loi, il s’est efforcé de servir non pas ses intérêts ou ceux du Parti conservateur, mais plutôt ceux des Canadiens.
Chers collègues, il a été effectivement réconfortant de voir tant de Canadiens travailler ensemble sur le projet de loi. Bien que nous ayons possiblement des points de vue différents sur de nombreuses questions nationales, je crois que nous devrions tenir compte de l’esprit non partisan avec lequel cette question a été abordée à l’autre endroit et agir collectivement au Sénat pour adopter le projet de loi C-220.
Honorables sénateurs, je vous exhorte à appuyer ce projet de loi simple, mais très important, qui profitera à de nombreux travailleurs canadiens et à leur famille.
Merci