26 avril 2012
Honorables sénateurs, je suis ravie de prendre la parole au sujet du projet de loi C-278, qui traite de la sensibilisation du public à l’épilepsie. Ce projet de loi a été présenté à l’autre endroit par le député d’Halifax-Ouest et au Sénat par le sénateur Mercer. Je les en remercie tous les deux.
Ce projet de loi a été adopté très rapidement à l’autre endroit et a obtenu un appui unanime, ce qui témoigne de son importance. Ce projet de loi propose que le gouvernement fédéral désigne officiellement une journée de l’année où chacun pourra marquer son appui aux personnes atteintes d’épilepsie. Il est proposé que cette journée de sensibilisation à l’épilepsie, la Journée lavande, ait lieu le 26 mars de chaque année.
J’amorcerai mes observations d’aujourd’hui en relatant l’historique du projet de loi et en décrivant les origines de la Journée lavande ainsi que nous la connaissons.
Ce sont les expériences vécues par une jeune Canadienne, Cassidy Megan, qui ont été la source d’inspiration à l’origine de la Journée lavande. Cassidy habite à Halifax, en Nouvelle-Écosse. Elle était très jeune lorsqu’elle a subi ses premières crises d’épilepsie, ce qui est une expérience effrayante pour n’importe qui. Pour apprendre à vivre avec son épilepsie, Cassidy s’est mise à poser des questions sur les luttes qu’elle devrait mener et sur les meilleurs moyens de s’y prendre. C’est ainsi qu’elle a eu l’idée de la Journée lavande, en 2008, dont le but était d’amener les gens à parler de cette maladie.
Cassidy et bien d’autres doivent faire un effort pour dissiper les mythes et faire savoir aux épileptiques qu’ils ne sont pas seuls. On en est venu à lancer la Journée lavande à l’échelle internationale pour faire en sorte que chacun puisse comprendre les difficultés que les épileptiques doivent surmonter. Depuis le lancement de cette initiative, l’histoire de Cassidy a eu un impact remarquable. Ses efforts visant à instituer cette journée méritent nos félicitations.
Cassidy et tous les Canadiens épileptiques méritent notre soutien. À titre de parlementaires, nous pouvons donner l’exemple au reste du monde. Cette année, les activités de la Journée lavande et d’autres activités de sensibilisation se sont tenues à l’échelle nationale et internationale. Des écoles, des entreprises, des célébrités et des organisations ont aidé à souligner cette journée au moyen de manifestations et d’activités dans le monde entier. Au Canada, des députés ont porté le ruban lavande pour témoigner de leur appui.
Le projet de loi à l’étude constituera un nouvel appui à ces activités, puisqu’il conférera un caractère officiel à la Journée lavande. Au cours de cette journée, les Canadiens seront invités à porter la couleur lavande pour manifester leur appui aux épileptiques et attirer l’attention du public sur cette cause. La Journée lavande coïncide avec le début du printemps, une saison d’espoir et de renouveau. La couleur lavande rappelle la fleur de ce nom, qui est reconnue internationalement comme le symbole de l’épilepsie. La lavande représente les sentiments d’isolement et nous rappelle la solitude et la stigmatisation dont souffrent souvent bien des personnes qui ont l’épilepsie ou d’autres troubles qui se traduisent par des crises.
En créant la Journée lavande, le projet de loi C-278 donne un visage à l’épilepsie. Il aidera notre société à mieux comprendre ce trouble et ses effets sur la vie des Canadiens qui en sont affectés. Par conséquent, dans un esprit de prise de conscience et de compréhension, je voudrais dire quelques mots au sujet de l’épilepsie.
Honorables sénateurs, l’épilepsie est un ensemble courant et multiforme de troubles neurologiques caractérisé par des crises. Elle touche plus de 50 millions de personnes dans le monde entier. Au Canada, elle est beaucoup plus répandue que la plupart d’entre nous ne le croient, car elle touche environ 0,6 p. 100 de la population et, chaque année, elle est diagnostiquée chez 15 000 personnes.
Dans 50 à 60 p. 100 des cas, la cause de l’épilepsie est inconnue. Chez les autres personnes atteintes, les causes les plus courantes sont des malformations au cours du développement du cerveau, une blessure à la tête qui fait apparaître des tissus cicatriciels dans le cerveau, de fortes fièvres et des convulsions prolongées pendant la petite enfance, des traumatismes à la naissance, une attaque ou une tumeur. L’épilepsie peut frapper à tout âge. Toutefois, 30 p. 100 des nouveaux cas observés chaque année concernent des enfants. Chez environ la moitié des enfants qui ont un diagnostic d’épilepsie, les crises disparaissent simplement avec le temps. Il importe également de signaler que les nouveaux cas qui apparaissent chaque année sont plus nombreux chez les personnes âgées de plus de 65 ans.
Le terme « épilepsie » vient d’un mot grec qui veut dire « être renversé, saisi ou attaqué ». L’épilepsie se caractérise par des crises soudaines, brèves et récurrentes qui peuvent être plus ou moins graves et entraîner une perte de conscience. Ces crises s’expliquent par un bref dérèglement des fonctions électriques normales du cerveau.
L’épilepsie s’accompagne de difficultés d’ordre social et personnel. Notons entre autres les dangers physiques liés à des crises imprévisibles, l’exclusion et d’autres formes de dévalorisation sociale. Cette dévalorisation peut faire hésiter la personne atteinte à révéler qu’elle a des crises et à se faire traiter. C’est pourquoi il est possible que le nombre d’épileptiques soit encore plus élevé que les chiffres officiels ne le disent.
Il n’existe aucun moyen de guérir l’épilepsie. Il y a néanmoins des médicaments et d’autres formes de traitement, dont des opérations chirurgicales, qui aident à gérer les crises. Une gestion réussie des crises peut avoir un impact important sur la qualité de vie, la participation à la vie collective et scolaire, au monde du travail et aux activités de loisirs. Les systèmes de soutien des traitements sont également indispensables. Beaucoup d’organisations nationales et provinciales donnent de l’information et un soutien aux Canadiens épileptiques, à leur famille et à ceux qui leur dispensent des soins.
Grâce à une sensibilisation plus poussée, nous pouvons améliorer le sort des épileptiques. La sensibilisation compte beaucoup pour aider à surmonter les difficultés. C’est avec plaisir que je signale qu’un mouvement important se dessine sur ce front. L’Association de l’épilepsie de la Nouvelle-Écosse s’est jointe à la campagne de la Journée lavande en 2008. Depuis, les appuis se multiplient. En fait, toutes les initiatives que nous observons correspondent bien à l’action mondiale qui s’orchestre autour de cette maladie.
Par exemple, Épilepsie Canada s’efforce maintenant de faire reconnaître la Journée lavande par l’Organisation mondiale de la santé et l’ONU. L’an dernier, la ministre de la Santé a reconnu le mois de mars comme Mois national de la sensibilisation à l’épilepsie. Des villes et des localités de tout le Canada font également quelque chose. Elles font de la sensibilisation non seulement à l’épilepsie, mais aussi à la prévention des blessures que la maladie peut causer. Il s’agit là de mesures importantes pour sensibiliser l’opinion et améliorer la qualité de vie des Canadiens épileptiques.
La Journée lavande incite les gens à parler de l’épilepsie et à comprendre les difficultés avec lesquelles les épileptiques sont aux prises. En appuyant le projet de loi et en reconnaissant officiellement la Journée lavande, nous favorisons cette compréhension.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-278 s’ajoute à un certain nombre d’initiatives fédérales au Canada. La recherche suscite l’espoir et nous aide à mieux comprendre ce trouble et ses traitements. La coalition Organismes caritatifs neurologiques du Canada regroupe 25 organisations qui appuient la sensibilisation et la recherche concernant la santé du cerveau. En partenariat avec les organismes de bienfaisance, le gouvernement du Canada a dépensé 15 millions de dollars sur quatre ans pour réaliser l’Étude nationale de la santé des populations relative aux maladies neurologiques. Ce partenariat a permis d’entreprendre un travail important pour nous aider à mieux comprendre les besoins de ceux qui sont affectés par des maladies et des troubles neurologiques, dont l’épilepsie.
L’Alliance canadienne de l’épilepsie fait partie des organisations membres de la coalition. Il s’agit d’un réseau pancanadien d’organismes communautaires qui prônent l’indépendance et la qualité de vie des personnes atteintes d’épilepsie et de leurs familles. En partenariat avec le gouvernement fédéral, ces organismes caritatifs partagent leurs expériences relatives aux répercussions des affections et troubles neurologiques, afin de nous sensibiliser, par exemple, aux facteurs de risque communs.
L’Enquête nationale sur la santé de la population est en fait divisée en plusieurs enquêtes distinctes. Les données ainsi obtenues permettent de mieux comprendre les troubles, comme l’épilepsie, et leurs répercussions sur la vie quotidienne. Cette enquête vise également à établir les répercussions des troubles neurologiques, comme l’épilepsie, sur la vie des Canadiens à la maison. Ces données sur la vie quotidienne nous aideront à définir les besoins des familles et des soignants.
Des équipes de chercheurs partout au pays collaborent à la réalisation de ces études. Nous savons que de tels partenariats de recherche pourraient non seulement nous permettre de nous attaquer aux véritables défis, mais également servir de base aux décisions et aux mesures préventives futures, ainsi que fournir des données détaillées.
En outre, le travail des Instituts de recherche en santé du Canada, les IRSC, vise également à combler les lacunes dans les connaissances sur l’épilepsie. Par l’entremise des IRSC, le gouvernement du Canada a investi plus de 46 millions de dollars dans la recherche sur l’épilepsie depuis 2006. En 2009-2010 seulement, il y a affecté 7,8 millions de dollars.
Les IRSC appuient également plusieurs partenaires qui prônent le développement de programmes de recherche novateurs dans des établissements postsecondaires de premier plan au Canada. Ils subventionnent par exemple la recherche menée par l’Institut et hôpital neurologiques de Montréal, rattachés à l’Université McGill, sur le lien entre les troubles neurologiques et l’épilepsie. C’est le fondateur de l’Institut neurologique de Montréal, l’INM, le Dr Wilder Penfield, qui, en 1950, a mis au point une technique pour traiter chirurgicalement l’épilepsie, appelée la « technique de Montréal ». Elle est maintenant utilisée dans le monde entier. Cette technique, ainsi que toutes les techniques connexes utilisées pour traiter chirurgicalement l’épilepsie, ont ensuite été perfectionnées par des médecins de l’INM, notamment William Feindel et André Olivier.
Dans ma vie professionnelle antérieure, j’ai travaillé pendant de nombreuses années comme chercheuse universitaire à l’Institut neurologique de Montréal. C’est à l’INM que j’ai personnellement découvert les difficultés que posent de nombreux troubles et affections neurologiques chroniques comme l’épilepsie dans la vie quotidienne, ainsi que le fardeau qu’ils représentent pour les familles et les aidants. J’y étais lorsque j’ai, pour la première fois, vu une chirurgie vraiment remarquable qui allait offrir de grands espoirs aux personnes atteintes d’épilepsie. C’est là aussi que j’ai conçu, il y a un certain nombre d’années, l’un de mes premiers projets de recherche visant à évaluer scientifiquement les résultats psychosociaux, notamment ceux des interventions chirurgicales destinées à traiter les crises.
Outre les recherches effectuées à l’Institut neurologique de Montréal de l’Université McGill, les IRSC soutiennent aussi d’autres travaux importants sur le rôle des gènes dans l’épilepsie et qui sont menés au Centre de recherche sur les maladies neurodégénératives de l’Université de Toronto.
Ces projets de recherche menés à l’Université McGill et à l’Université de Toronto visent à améliorer le diagnostic et à contribuer à la mise au point de meilleurs traitements.
En juin 2011, les IRSC ont financé le Brain Connectivity Workshop à Montréal. Cet atelier a réuni des experts internationaux du développement du cerveau, de l’épilepsie et de la neuroscience qui ont partagé leur savoir et contribué à une compréhension commune des troubles comme l’épilepsie.
Honorables sénateurs, les partenariats et les initiatives comme ceux-ci consolideront la recherche canadienne en neurologie. Des recherches poussées permettront de faire des percées fructueuses en vue d’améliorer la compréhension de l’épilepsie, de ses causes et des interventions possibles afin d’améliorer la qualité de vie des personnes qui en sont atteintes. Le gouvernement du Canada, qui travaille en étroite collaboration avec tous nos partenaires, participe déjà à la sensibilisation tout en contribuant à la recherche.
J’aimerais parler d’un autre sujet très important dans ce dossier, le rôle de la prévention des blessures et de la sécurité, un secteur auquel le gouvernement fédéral a choisi d’accorder une attention accrue. Le gouvernement fédéral et ses partenaires savent que les blessures involontaires sont, dans les faits, la principale cause de décès chez les enfants et les jeunes. Plusieurs traumatismes crâniens qui, dans les cas graves, pourraient entraîner des attaques et de l’épilepsie surviennent lors d’activités sportives et récréatives. De nombreuses mesures peuvent être prises pour réduire ces risques.
Le gouvernement du Canada a mis sur pied une initiative intitulée Actifs et en sécurité, qui vise à prévenir les blessures chez les enfants et les jeunes et qui représente un important investissement en matière de prévention. Dans le cadre de cette initiative, le gouvernement a versé 5 millions de dollars pour permettre à des organismes communautaires de mettre en œuvre des activités de sensibilisation à la sécurité dans les sports et les loisirs, dans le but de prévenir les incidents comme les commotions cérébrales, les noyades et les fractures graves.
Honorables sénateurs, je crois que les initiatives et le soutien dont je viens de parler constituent des pas dans la bonne direction. Il nous en reste cependant beaucoup à apprendre sur les affections et les troubles neurologiques comme l’épilepsie. Le gouvernement du Canada continuera à collaborer avec ses partenaires afin de favoriser la compréhension et de sensibiliser la population à ce sujet. Un peu partout au pays, de nombreux bénévoles et organismes s’emploient à améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d’épilepsie et de leur famille.
Nous avons cependant tous un rôle à jouer. J’espère que tous les sénateurs appuieront ce projet de loi.
En guide de conclusion, j’aimerais citer Cassidy Megan, qui nous rappelle l’importance de la Journée lavande :
J’ai commencé la Journée lavande parce que, quand j’ai découvert que je souffrais d’épilepsie, j’ai eu peur et j’ai eu honte de ce que les autres pouvaient penser. Je pensais aussi que j’étais la seule enfant dans le monde avec l’épilepsie. Je voulais avoir une journée où tout le monde pourrait donner son soutien aux personnes atteintes d’épilepsie et renseigner les gens sur l’épilepsie. Éduquer la population sur l’épilepsie est très important parce que les gens ont besoin de savoir quoi faire s’ils voient une personne ayant une crise. Ils ont besoin de savoir qu’il existe différents types de crises et qu’ils ne doivent pas avoir peur de l’épilepsie ou des personnes qui l’ont. L’éducation aide aussi les gens avec l’épilepsie pour qu’ils sachent qu’ils ne sont pas seuls. Depuis que j’ai commencé la Journée lavande, je me sens spéciale parce que j’aide les gens à travers le monde. Je ne me sens pas seule, effrayée ou embarrassée.
Honorables sénateurs, manifestons clairement notre appui à Cassidy Megan et aux autres personnes épileptiques en adoptant à l’unanimité le projet de loi C-278, qui vise à faire du 26 mars la Journée lavande.